• VI.

    Il faut avouer que pour Mello et moi, le mois de novembre était un mois particulièrement dur, qui semblait n'être là que pour nous rappeler de mauvais souvenirs. Personnellement, j'avais toujours haï le mois de novembre. Enfant, il me séparait de la période des fêtes et des vacances. Adolescente, il me déprimait littéralement. Et maintenant… Maintenant, il me rappelait la situation de merde dans laquelle nous étions. Et la mort de L.

    Le 5 novembre 2018, jour qui marqua au fer rouge le fait que L était mort depuis exactement un an à présent, Mello et moi tentâmes d'échanger quelques paroles réconfortantes, mais au fond, nous savions que tout cela n'était que des illusions. Et pour tout vous dire, ce jour-là, non content de nous rappeler que L s'était fait assassiner par Kira, nous rappela également que nous aussi, nous risquions nos vies. Nous courrions les mêmes risques que L. Nous risquions, nous aussi, de nous faire assassiner par Kira. Jusqu'ici, je n'avais pas voulu y penser et je ne l'avais jamais mentionné, mais ce jour-là, en servant à Mello un chocolat chaud, je ne pus m'empêcher de dire ça à voix basse, mais suffisamment audible pour que Mello m'entende.

    Il me répondit alors que nous allions arriver à nous en tirer, tôt ou tard. Que nous allions arrêter Kira. Qu'à la fin, nous gagnerions. Mais il n'avait pas réussi à contrôler sa voix qui tremblait, comme s'il était à deux doigts de pleurer.

    – Le problème, souffla-t-il à peine quelques secondes plus tard, tout en serrant entre ses mains un mug Assassination Classroom, …le problème, c'est que je… Je suis pas comme L. Je… J'ai peur de mourir. J'ai peur d'y arriver… Là où lui, il était sûr de lui, moi je… Bordel ! Chaque fois que je me dis que je peux y arriver, faut toujours que je me rappelle de mes échecs face à Near, ou de ce que mon père me disait… J'EN PEUX PLUS !

    Moi, de mon côté, je n'osai pas réagir. Je me mordais les lèvres jusqu'au sang pour ne pas pleurer, et je priais pour qu'on arrive à tuer Kira et à venger L.

    Mello finit par se reprendre, et lança soudain qu'il était bien prêt à mettre ses doutes de côtés. Que ce n'était pas en doutant de lui-même qu'il allait avancer.

    – Je vais arrêter Kira. Je vais battre Near. Pour moi, pour toi, mais aussi… Mais aussi pour L. En son nom, en sa mémoire… Où qu'il soit, je retrouverai et je tuerai Kira. J'ai été élevé dans le but de devenir le nouveau L, après tout. J'ai échoué, mais il n'est pas trop tard. Je fais le serment que la mémoire de L continuera d'exister dans ce monde. …Même si je dois en mourir. Je suis prêt à tout.

    Je pris Mello dans mes bras, et tout en essayant toujours de retenir mes larmes, je soufflai entre deux semi-sanglots que moi aussi, j'étais prête à tout. Après tout, si aujourd'hui, j'étais celle que j'étais, c'était parce que j'avais toujours idolâtré L. Maintenant que cette idole avait disparu, je me devais de veiller à ce que sa mémoire ne disparaisse pas également, et d'exterminer le meurtrier qui l'a tué.

    Les mois passèrent, puis les années. Nous nous retrouvons donc à présent le 5 novembre 2020. Ce jour-là, la pluie tombait à grosses gouttes partout à Los Angeles, ce qui n'empêchait pas Mello de vouloir sortir. Cette année, nous avions décidé que nous ne nous laisserions pas abattre. Juste le temps d'une journée, nous allions laisser le passé mourir, histoire de ne pas trop en souffrir. Juste le temps d'une journée, nous allions arrêter de penser à ce que nous avions laissé derrière nous il y a trois ans. Ne pas penser à L. Ne pas penser à Matt. Ne plus penser à rien. Si on laissait toujours le passé parasiter nos esprits, nous ne nous en sortirions jamais. Les deux années précédents, nous avions horriblement souffert chaque fois que ce maudit jour de novembre était venu. Cette année… Nous voulions au moins essayer de nous libérer de toute cette pression et de ce désespoir.

    Mais ça, c'était plus facile à dire qu'à faire.

    J'arborais les ruelles de différents quartiers paumés de L.A., seule. Mello était parti de son côté, que ce soit pour faire des recherches, ou bien pour broyer du noir de son côté sans que je puisse le voir sous un jour déprimé. Ayant moi-même choisi cette option, j'imaginais qu'il en allait de même pour lui. Au final, quand nous avions décidé de ne pas penser à notre passé, nous voulions plutôt dire que nous n'allions pas emmerder l'autre avec nos sombres pensées. Au fond, c'était peut-être pas plus mal comme ça. Penser par moi-même ne me faisait pas de mal, bien au contraire. J'espérais qu'il en allait de même pour Mello. Parfois, le temps d'une minute, je craignais qu'il ne tente de se suicider, ou qu'il ne se fasse agresser sans que je puisse rien faire, mais je me posais juste trop de questions.

    « Ouais, ça me fait pas de mal d'être un peu seule… Je suis complètement parano dès qu'il s'agit de Mello, putain. »

    Je poussai un petit sourire et continuai ma marche solitaire, réajustant ma capuche sur ma tête, tout en chantonnant Boulevard of broken dreams d'un air absent. J'avais rien de plus générique en tête pour coller à ma situation actuelle, après tout. « I'm the only one and I walk alone… »

    Tandis que je marchais en chantonnant, je me sentis de nouveau immergée de souvenirs que j'aurais préférés chasser de ma mémoire. Ma première, seule, dernière, rencontre avec L. Cette naïve promesse d'un jour travailler avec lui sur une enquête au moins aussi complexe que les cas Beyond Birthday ou Kira. Kira… J'aurais tout donné pour le coincer. Quand je pense qu'un jour, je m'étais dit qu'il n'avait peut-être pas tort ! J'étais si stupide, à cette époque…

    Je relevai soudain la tête et me rendis compte que j'étais perdue dans un coin que je n'avais jamais visité auparavant. Et évidemment, l'imbécile que je suis n'avait pas pensé à installer un putain de GPS sur son téléphone portable… Et pour moi qui avait un sens de l'orientation dont la note était proche du zéro, il ne manquait vraiment plus que ça.

    – Génial. J'suis dans la merde.

    Je pris un chemin au hasard et me lançai. De toute façon, il fallait bien que je tente de retrouver mon chemin. Et dans le pire des cas, je pouvais toujours appeler Mello, même si je préférais ne faire ça qu'en cas d'urgence. J'essayai alors de reconnaître les tags sur les murs, ce qui était tout de même un bon moyen de se repérer.

    C'est là que je le vis. Au départ, je ne le reconnus pas réellement, et je crus à une simple hallucination, mais en me rapprochant de lui, j'étais sûre de moi. Aucune erreur n'était possible.

    Je m'accroupis vers le jeune homme étendu sur le sol, visiblement complètement sonné, peut-être même drogué. En trois ans, il n'avait pas tant changé que ça. Ses cheveux bruns étaient toujours coiffés d'une coupe emo, son visage, bien qu'affecté par la drogue et le tabac, affichait toujours la même petite moue blasée, et il portait toujours les mêmes lunettes oranges dignes d'un Star Wars.

    – Matt ?! Matt, c'est toi ? Putain… Allez, Matt, réveille-toi, je t'en prie… !

    Que faisait-il ici ? Comment était-il arrivé là ? Que lui était-il arrivé ? Comment s'était-il retrouvé dans cet état ? Qui lui avait fait ça ? Trop de questions s'entrechoquaient dans mon esprit d'un seul coup. Je le secouai un peu pour le faire se réveiller de force, mais mes efforts semblaient inutiles. Cependant, il respirait toujours…

    Je saisis mon téléphone portable et composai à toute vitesse le numéro de Mello. Lorsque celui-ci répondit, je ne lui laissai même pas le temps de me demander ce qu'il se passait.

    – Mello ? Localise mon téléphone et viens tout de suite. J'ai besoin de ton aide.

    J'éteignis mon téléphone et pris Matt dans mes bras. Mello arriva environs cinq minutes plus tard et me demanda aussitôt ce qu'il se passait, avant de s'interrompre dans sa propre question, lorsqu'il vit le corps de Matt dans mes bras.

    – Putain… Il est vivant ?

    – Oui, je crois. Mais tout juste… Faut qu'on rentre et qu'on le soigne, sinon il va pas s'en tirer…

    – Putain… Il est vivant. Il est vivant. Après tout ce temps… Je sais pas qui lui a fait ça, mais je leur ferai payer ce qu'ils lui ont fait. Matt, t'en fais pas, tu vas t'en tirer. Tout va bien se passer. On est là. Eden, laisse-moi le porter, je suis plus fort que toi. On n'est pas trop loin du QG, ça devrait aller. Faites qu'il tienne le coup…

    Sur le chemin du retour, je ne pus m'empêcher de faire part à Mello de mes questions et de mes doutes, notamment sur la probabilité de chances pour qu'on retrouve Matt comme ça, inopinément. Je me demandais sincèrement ce qu'il pouvait faire ici. Venant de Matt, on pouvait s'attendre à tout. Néanmoins, ma plus grande inquiétude pour l'instant restait de savoir s'il allait tenir le coup, et comment il avait pu se retrouver dans une telle situation. Tant de questions, auxquelles ni Mello ni moi n'avions de réponses. C'était d'un frustrant…

    Arrivés au Q.G., nous nous précipitâmes vers la chambre de Mello, où celui-ci allongea Matt. Je courus alors chercher le sac vendu avec la Pullip que Mello m'avait offerte, sac dans lequel je tenais désormais toute une trousse de premiers secours. On ne sait jamais, ça pouvait servir. Je séchai rapidement les cheveux, le visage et les vêtements de Matt afin qu'il ne meure pas de froid, tandis que Mello s'occupait de chercher précisément ce qu'il avait.

    – Bon, déjà il n'a pas de marques qu'il aurait pu recevoir pendant un combat, c'est déjà ça… Mais je sais pas, c'est bizarre, c'est comme si on lui avait injecté des calmants de force, quelque chose comme ça…

    – Tu penses qu'on peut faire quelque chose ?

    – Dans la mesure où il n'est ni malade, ni blessé, on ne peut qu'attendre, et espérer qu'il va se réveiller. On n'a pas vraiment d'hôpital à notre disposition, et dans son état, je pense pas que ce soit une bonne idée d'utiliser un défibrillateur ou une connerie du genre… Mais il va s'en sortir. J'en suis sûr.

    Un sourire peu convaincu se dessina sur mon visage. J'espérais sincèrement qu'il avait raison. Il fallait évidemment que je garde espoir, mais les expériences que j'avais vécues au cours de ma vie m'avaient appris une chose : ne jamais idéaliser la situation, et toujours se préparer au pire. Alors certes, Mello était comme moi de ce côté-là, mais n'empêche, il avait cette détermination et cette assurance qu'il me manquait un peu, la plupart du temps. Je regardai mon sweat-shirt oversize Undertale, cadeau de ma mère pour mes quinze ans. Le cœur emblématique du jeu tenait toujours, plus de trois ans plus tard, ainsi que le message « Stay Determined ». Ouais. « Reste déterminé… » J'en avais bien besoin, pour être honnête. Et ce n'était pas la première fois dans ma vie.

    Lorsque j'avais découvert Undertale, j'étais de mauvaise humeur. Sans raison apparente, j'étais juste tout le temps en colère, contre une bonne partie du monde. J'avais 14 ans, j'en voulais à mon père, j'étais épuisée de l'entraînement qu'il me faisait subir à distance, j'en avais marre des cours, j'en avais marre des personnes que je côtoyais que ce soit dans la vraie vie ou sur Internet, et je ne partageais pas grand-chose avec ma mère de peur qu'elle ne me juge par rapport à la « merde » que je regardais à l'époque. Vint le jour où quelques Youtubeurs français que j'appréciais se mirent tous à jouer à Undertale, un patch dans cette langue étant sorti. Cela faisait un moment que le jeu m'avait intriguée sans que je me décide à plonger dedans. Cependant, cette fois, je décidai de me lancer dans l'aventure.

    Ce fut alors une révélation. Et non content d'être mon jeu préféré, d'être celui qui m'a le plus intéressée, celui dont l'histoire m'a le plus passionnée, celui dont les personnages étaient les plus attachants, en plus de tout cela, Undertale avait eu le mérite de me faire rire. Décompresser. Déconner. Délirer. En y jouant, j'avais certes pété plombs sur plombs sur pas mal de combats, mais je ne finissais jamais frustrée comme je l'étais à la fin d'une partie de Mario ou de Tetris, par exemple. Undertale était l'un des rares jeux auxquels je m'accrochais, même quand je mourais vingt fois de suite sur le même mini-boss pourri. Parce que j'adorais sincèrement ce jeu. Les personnages, l'histoire, l'humour, tout cela m'avait touché en plein cœur, ainsi que certaines répliques bien placées, qui me permettaient toujours de m'accrocher.

    « Take care of yourself, kid. 'cause someone really cares about you… » Pas tout à fait faux, celle-là, quand j'y repense. Le nombre de fois où je m'étais dit que personne ne s'inquiétait pour moi. Le nombre de fois où je me souvenais qu'enfant, j'avais ma mère, et que maintenant, j'avais Mello.

    « And despite everything, it's still you. » Ouais, ça c'est bien ce que je me disais chaque jour depuis des années, chaque fois que je me regardais dans le miroir. Malgré tout ce que j'avais fait et vécu, c'était toujours moi. Pas toujours facile à croire. J'avais l'impression d'avoir plus changé en trois ans qu'en quinze ans, de ma naissance jusqu'à mon arrivée à la Wammy's House. Mais bon. Au fond, c'était toujours moi, cette petite imbécile d'Elena Asher. Enfin… Eden, maintenant. Je préférais tellement ce nom-là.

    Stay Determined. C'était ce que je devais faire dans notre situation. Je devais avoir la même réaction que lorsque je mourrais en boucle face à Flowey dans Undertale. Je devais rester déterminée et garder espoir. Les choses allaient bien finir par s'arranger, d'une manière ou d'une autre. Quand on arrêtera Kira, tout ça prendra fin. On est plus près que jamais de l'avoir. C'est ce que je me devais de penser.

    Ça va aller.

    Matt va forcément finir par se réveiller.

    Arrête de stresser, idiote.

    Alors que je repensais à cela, Matt avait eu quelques légers spasmes. Mello se tenait à l'autre bout de la pièce, adossé contre un mur en mangeant une énième tablette de chocolat. Un jour, il allait falloir que je lui demande comment il se les procurait… Il semblait chercher quelle était la meilleure position décontractée et badass à adopter lors du réveil de Matt. Rien qu'en songeant à cela, je levai les yeux au ciel et retint un petit rire, tout en prenant la main de Matt dans la mienne.

    – Courage, Matt… Tu peux le faire. Tu peux survivre. Tu en as la force. Je le sais. Tu vas pas te laisser abattre aussi facilement, hein ?

    Je souris et effleurai ses cheveux bruns ébouriffés d'une main. Il bougea légèrement de nouveau. Mello s'approcha, et je me mis à me ronger les ongles de la main droite. Matt poussa un nouveau petit soupir, et malgré ses lunettes, je pus remarquer que ses paupières commençaient à vaciller, comme s'il sortait enfin de son état comateux pour ouvrir les yeux. Lorsque je me retournai vers Mello, celui-ci était à présent juste à côté de moi, oubliant pour l'instant son envie de paraître stylé.

    Quelques temps plus tard, Matt ouvrit enfin les yeux. Il lui fallut cependant un peu plus de temps pour les ouvrir totalement sans les refermer une demi-seconde plus tard. Au bout d'une minute environs, il semblait aller mieux de ce côté-là, et se mit alors à regarder autour de lui d'un air surpris et quelque peu apeuré, ce que je pouvais comprendre.

    – Où… Où est-ce que je suis…? Je… Je dois rêver… Mello, Eden, c'est vous ? C'est pas possible…

    – Et pourtant dis-toi que c'est réel, Matt, dis-je d'un ton se voulant rassurant. On est dans notre Q.G., à Los Angeles, au passage.

    – L-Los Angeles ? Ah ouais, j'me souviens… Putain, mais qu'est-ce qu'il s'est passé ?

    – On espérait que tu nous le dirais, justement, déclara Mello en croquant dans sa tablette de chocolat. Ed' t'a trouvé inconscient dans une ruelle. T'étais complètement dans les vapes, et même si t'avais rien de suspect sur toi, je serais prêt à parier que t'avais pris de la drogue… 'fin ça tu sais, à part pour te demander qui est ton fournisseur et s'il file de la qualité, j'm'en fous pas mal, mais bon. Ce qui m'importe, c'est surtout de savoir ce que tu fais là, à Los Angeles, endroit où comme par hasard, on se trouvait.

    – Mets-toi à ma place, Mello, souffla Matt en se redressant. Quand vous êtes partis, j'étais désespéré, et terrifié. Pendant des mois, je suis pas sorti de ma chambre, et je suis juste resté sur mon lit à pleurer. Un peu plus tard, je me suis cassé d'ici, et là, bah… J'suis passé par une mauvaise passe, et j'en suis pas vraiment sorti, comme tu vois. Donc j'ai commencé à me… Enfin voilà. Et en même temps, j'étais obnubilé par l'idée de vous retrouver. Tu sais, Mello, t'étais particulièrement bien caché, personne de normal ne pourrait te retrouver, mais tu as face à toi le meilleur hacker de l'histoire, surtout pour ce qui concerne les sites de vente… Et bon, quelques bonnes centaines de tablettes de chocolat d'une marque bien précises, certes livrées à différentes adresses et différents noms, mais toujours dans les environs de Los Angeles pour toi et un certain nombre de Pullips et de goodies Undertale… Je suis désolé, mais c'était évident que c'était vous deux. Alors, y'a un mois, je suis parti à L.A. pour vous retrouver, tous les deux. …Au final, j'ai réussi mon coup.

    Je le regardai en retenant des larmes de joie. Il était allé jusque-là dans le seul but de nous retrouver ? Je rêve. Sérieusement, ce mec était l'ami le plus génial dont j'aurais pu rêver.

    – T'es sûr que ça va ? T'as besoin de quelque chose ?

    – Une Game Boy Advance et tout ira parfaitement bien, répondit Matt avec un petit sourire. …Au fait, si ça vous emmerde pas… J'aimerais vous aider. Peu importe ce que vous faites, peu importe vos méthodes pour arrêter Kira… Je veux vous aider. Je pourrais vous être utile. Demandez-moi de faire quelque chose et je le ferai sans hésiter.

    – Je peux pas accepter, répondis-je en coupant la parole à Mello, qui s'apprêtait probablement à accepter. Matt, je refuse que tu mettes ta vie en danger pour ça. C'est notre combat. Je veux pas te mêler à ça. Et puis toi-même, tu m'avais dit que…

    – C'était il y a longtemps, Eden. J'ai grandi. J'ai évolué. De toutes façons, dans le monde dans lequel on vit pour l'instant, aucun de nous ne peut espérer avoir la vie de ses rêves. Alors quitte à lutter contre Kira, je veux le faire avec vous. Je m'en fous de risquer ma vie. Je m'en fous de mourir dans la lutte. Si je peux vous aider en quoi que ce soit, je le ferai sans hésiter une seule seconde.

    – Matt…

    Je regardai Mello du coin de l’œil. Celui-ci soupira et s'assit à côté de Matt, le prenant par les épaules.

    – Matt… Les gens comme toi sont rares. Tu es extraordinaire. Vraiment, entre toi et Eden… Je pourrais pas rêver mieux comme coéquipiers. Comme amis. Si tu veux collaborer avec nous, j'accepte avec plaisir. Mais je tiens à ce que tu saches que sauf en cas de dernière mesure, je ne te mettrai jamais en danger de mort, pas plus qu'Eden. Ni même que moi. En fait, vous savez quoi ? Ça tombe bien. J'ai trouvé récemment la mafia la plus puissante de tous les États-Unis. Ça fait un bail que je veux trouver un moyen pour la rejoindre, et j'ai justement ma petite idée sur comment faire, depuis quelques temps. Ed', j'avais pas très envie de te laisser seule le temps de le faire, mais maintenant qu'on a retrouvé Matt, tu auras un peu de compagnie pour la semaine à venir. Une fois que ce sera fait, quoi qu'il arrive, c'est ces mecs qui se prendront les coups, et pas nous. Tant qu'il y en aura au moins un en vie et que Kira n'aura pas connaissance d'eux, on ne risquera absolument rien.

    – Tu penses que tu vas y arriver, Mello ?

    – Ouais. Vendre un parrain de la mafia que même Kira n'a jamais réussi à tuer, ce sera pas bien compliqué. Pas plus que de les manipuler pour obtenir ce qu'on veut. Je pense qu'il suffira de leur faire comprendre à quel point Kira est une menace pour leurs petites affaires, et à ce moment-là, ils seront soumis à ma volonté. Je suis un génie, après tout. Je ne me trompe jamais. Je ferai l'affaire. Vous verrez.

    Mello partit le lendemain matin sans perdre la moindre seconde, comme il fallait s'y attendre. L'avantage de se retrouver avec Matt, c'était qu'au moins, non contente de ne pas être seule, j'étais avec un ami qui partageait la plupart de mes goûts. J'avais soudain l'impression que tout redevenait comme à l'époque de la Wammy's House, lorsque tout allait bien, et que Matt et moi pouvions passer des heures à jouer à Final Fantasy XV et écouter à fond du My Chemical Romance ou du Fall Out Boy. Je retrouvais enfin ce qui me manquait depuis exactement trois ans. En regardant Matt, j'avais l'impression qu'il ressentait la même chose que moi…

    Je sais pas si vous connaissez Teenagers, de MCR. Je crois que j'avais déjà dit que Matt aimait écouter cette chanson plus que tout au monde. Tout comme moi. Déjà, bien avant de rejoindre la Wammy's House, j'étais une fan du groupe, et de cette chanson, que je pouvais passer en boucle avec ma famille. De temps en temps, c'était un événement aléatoire, mais ma grand-mère me demandait qui était le « they » que mentionnait le chanteur. Selon ma mère, c'était le gouvernement. Eh bien, là, imaginez que la situation est retournée.

    Maintenant, le « they », c'était les gens comme Matt, comme Mello et comme moi, ou en tous cas, ça correspondait bien à ce que nous étions. Pas juste des membres d'un gang. Des mafieux adolescents et désabusés. Le combo de la mort, j'imagine vous serez d'accord avec moi. Mais ouais, en gros, c'était un peu ça, l'histoire. On avait nos méthodes, et on n'aurait pas peur d'arracher des têtes et des rêves pour parvenir à nos fins. On dormait avec nos armes dans les mains. On surveillait tout et tout le monde. On était toujours prêts à toute éventualité sanglante. C'est nous qui menacions sans cesse le gouvernement, pas l'inverse. C'est nous qui allions dominer.

    Pendant une semaine, je passai donc le plus clair de mon temps avec Matt. Mello me téléphona le deuxième jour pour m'annoncer qu'il ne reviendrait probablement pas dans notre Q.G. tant que les mafieux ne seraient pas sûrs à 100% de nous accepter. Génial. Heureusement que Matt était de bonne compagnie, parce que sinon, je me serais vraiment ennuyée. Et quand je m'ennuyais, moi, j'étais capable de tout. Du coup, la présence de Matt aidait pas mal. Nous jouions, nous discutions, nous écoutions de la musique, comme deux amis le feraient. Une fois, Matt me prouva ses talents de hacker en piratant les dossiers de la Maison Blanche, remplaçant tous les dossiers présents sur le site par des vidéos de différents hentai. C'était con, mais cela eut le mérite de nous faire rire pendant tout l'après midi.

    Le sixième jour, Matt me fit part de ses projets de tatouages et de piercings. Il me révéla alors qu'il voulait s'en faire depuis des années, mais qu'il n'osait pas, qu'il avait peur des aiguilles, ce genre de choses.

    – Tu dois vraiment me prendre pour un con, soupira-t-il en allumant une cigarette.

    – Nan. Je serais de mauvaise foi, si je te trouvais con pour ça. J'suis dans la même situation que toi, pour tout te dire. Mais dis-moi, c'est quoi, ces tatouages que tu veux tant te faire ?

    – Déjà, je sais pas si tu sais, mais au Japon, y'a pas mal de gens qui se font tatouer des carpes et des dragons, par symbolique, tout ça, tu sais ? J'suis con, t'as étudié la civilisation japonaise et tu parles couramment japonais, tu sais forcément ça… M'enfin, bref, j'aimerais bien me faire un tatouage de ce genre… Sauf qu'au lieu de la carpe, je veux me faire un Magicarpe, tu sais, le Pokémon tout pourri qui devient un badass ! Et je veux que le dragon ait plutôt la tronche de ceux du Seigneur des Anneaux ou de Game of Thrones ! Ça en jette beaucoup plus ! Enfin je veux un truc bien badass, quoi !

    – Matt, t'es défoncé ?! m'exclamai-je en éclatant de rire. Un Pokémon qui devient Smaug, qu'est-ce que t'as fumé ?

    – Je suis très sérieux ! s'offusqua Matt en retenant un rire malgré tout.

    Le lendemain matin, un message de Mello me parvint sur mon téléphone :

    « Tout est prêt. Je vais te donner les coordonnées de l'endroit où nous serons désormais logés en pièces jointes. Mémorise bien le lieu. Une fois que ce sera fait, débarrasses-toi ton téléphone. Dis à Matt de se préparer aussi.

    P.S. : Je me fous de savoir comment tu géreras, mais je veux mon canapé dans notre nouvelle base. »

    Je levai les yeux au ciel et montrai le message à Matt. Celui-ci jeta un regard en coin vers l'horreur en imprimé zèbre et retint un petit rire. « Mais qu'est-ce qu'il a avec cette merde de canapé ? » soupirai-je en ouvrant les pièces jointes au message.

    Arrivés au lieu de rendez-vous, Matt et moi eûmes vite fait de comprendre qu'il ne s'agissait pas de la base actuelle de la mafia, mais simplement d'un endroit où l'un de leurs gars devait venir nous chercher en voiture. Blindée et aux vitres teintées, dieu merci.

    L'homme qui vint à nous se faisait appeler Rod Ross, et devait bien mesurer dans les deux mètres, en plus d'être incroyablement bien baraqué. Pour être tout à fait honnête, cet homme ne me mettait pas très à l'aise, même s'il paraissait plutôt amical envers Matt et moi. Comme si Mello et lui étaient deux amis de longue date et que Ross était du genre à appliquer à la lettre l'expression « les amis de mes amis sont mes amis. »

    Ouais, moi j'ai toujours dit que l'amitié c'est surfait, de nos jours, mais bon. Je préférais largement avoir ce colosse avec moi que contre moi.

    Après nous avoir posé quelques questions et avoir tourné dans le vide pendant plus d'une heure, Ross finit par garer sa voiture dans un parking sous-terrain très bien emménagé, et qu'il aurait été impossible de remarquer si nous n'avions pas su qu'il se trouvait là. C'était parfait.

    Ross nous fit descendre de la voiture et nous conduisit dans le salon, dans lequel Mello trônait, assis sur un fauteuil violet clinquant, une tablette de chocolat à la main. Il prenait son pied façon méchant de James Bond nouvelle version. En le voyant, comme ça, il ressemblait vraiment à un parrain de la mafia, et semblait parfaitement dans son élément, alors qu'en soit, il n'avait pas du tout changé physiquement. À croire que Mello était fait pour le pouvoir. Qu'il était fait pour être le numéro un. Rien qu'en le voyant prendre son pied de la sorte, sublime et rayonnant, me faisait sourire.

    Après nos petites retrouvailles avec Mello, Matt préféra s'éclipser au fond de la pièce pour finir son niveau de Mario, tandis que je faisais la rencontre des autres membres de la mafia. Je n'aimais pas ça du tout, mais bon, il fallait bien créer des liens, si je voulais qu'il me fassent confiance et qu'un jour, ils fassent ce que je leur demande, en cas de besoin.

    À la fin de la journée, je m'effondrai sur mon lit. J'avais rapidement aménagé ma chambre, c'est-à-dire que la plupart de mes Pullips vacillaient sur leurs socles, que ma PS4 était posée en vrac sans le moindre respect et que mes posters avaient besoin d'être mieux punaisés que ça, mais c'était pas vraiment le moment de se plaindre. Pour l'instant, tout ce que je voulais, c'était me reposer un peu. Mello vint me rejoindre dans ma chambre quelques minutes plus tard, pour mon plus grand plaisir. Je me tournai vers lui en souriant.

    – Alors ? Cette semaine ?

    – Pas si chiant que ce qu'on pouvait croire. J'ai juste fait durer le plaisir, en fait. Voir ces connards me poser des tas de questions, me tester, tout ça… C'était bien trop drôle.

    – J'aurais voulu voir ça.

    – Oh, je pense pas que c'était très différent d'un des jeux vidéo de Matt, tu sais. Maintenant, le tutoriel est fini, et la première phase l'est également. On rentre dans le cœur du jeu. Et on est plus proches du boss final que tu ne le crois.

    – Trois ans pour un tuto et une première phase ? soufflai-je. Enfin après tout, c'est pas un jeu réservé à des gamins de maternelle. Et même des hardcore gamer comme nous avons besoin d'entraînement pour y arriver. Mais je pense que t'as raison. On arrivera bientôt au boss. Maintenant, je pense que chaque jour nous rapproche un peu plus de Kira. On va l'arrêter. On va y arriver. Quitte à se servir de la mafia. Maintenant qu'on a Matt avec nous, on pourra pas perdre.

    – Exactement, déclara Mello en m'embrassant le cou.

    J'eus un petit rire et je l'embrassai en retour.

    « Kira, tu ne perds rien pour attendre. »

    Les jours passèrent. L'avantage de la mafia, c'est qu'on ne s'emmerdait jamais vraiment. Il se passait toujours quelque chose. Un mec random faisait toujours une connerie, et là, bonjour la lapidation des temps modernes. Lapidation à laquelle je me prêtais de temps en temps, ou en tous cas lorsque le problème me touchait. En soit, je me foutais pas mal que quelqu'un utilise la drogue de l'association pour son usage personnel, c'est pas comme si elle me servait beaucoup, cette drogue. (Concernant Matt et Mello, en revanche, je ne dirai rien. Matt ne se cachait pas et se droguait dès qu'il en avait l'occasion, et lui et moi ne pouvions nous empêcher de soupçonner Mello de mettre quelque chose dans son chocolat au vu des conversations qu'il pouvait parfois tenir.) En revanche, quand quelqu'un dilapidait mon argent, qui aurait pu servir à quelque chose de bien plus important que ses dettes à un quelconque patron, beau-père ou Yakuza, peu importe, – des choses plus importantes comme par exemple une paire de Demonia, une Pullip ou un jeu vidéo –, là je le prenais mal. Là, ça me faisait du bien de me venger ne serais-ce qu'un tout petit peu.

    Étais-je moi-même devenue une mafieuse barbare sans foi ni loi ? Possible. Mais d'après Mello, c'était plutôt une bonne chose, et il avait raison. Nous allions probablement rester dans ce gang un bon moment, jusqu'à ce que Kira soit arrêté, en tous cas. D'ici-là, il valait mieux nous intégrer plutôt que de refuser de leur adresser la parole. Même Matt, à sa manière, faisait des efforts. C'est-à-dire que lorsque Ross ou un autre regardait dans son dos lorsque sa PS4 était allumée, il daignait parfois lui passer sa manette pour le laisser profiter du bonheur qu'était de jouer à Sword Art Online : Lost Song. Un saint. Moi, j'en aurais jamais fait pareil.

    Enfin, moi, encore, je n'avais pas à me plaindre. En temps que petite amie du boss de l'organisation, j'étais intouchable. Un mot de travers, Mello pouvait se permettre de descendre la personne qui m'emmerdait. Ou je pouvais lui demander de lui rendre la vie impossible, en tous cas. J'avais jusque-là été une personne relativement humble, mais pour le coup, je dois reconnaître que j'adorais la situation dans laquelle je me trouvais. Pour une fois que je pouvais me permettre de porter une jupe laissant presque entrevoir ma culotte, un top en cuir, un porte-jarretelle et des bottes Demonia montant jusqu'en-dessous des genoux sans avoir à craindre la moindre petite remarque, je profitais.

    Pour la vie relativement sympa à laquelle nous avions droit en ce moment, j'étais bien prête à suivre Mello n'importe où, pourquoi pas jusqu'en Enfer…

    Ah, suis-je bête. J'oubliais ce foutu canapé imprimé zèbre, que Mello ne voulait définitivement pas lâcher… Oui, il l'avait récupéré. Oui, il s'asseyait toujours dessus comme s'il s'agissait du Trône de Fer lui permettant de conquérir le monde entier. Je sais que vous direz que je me plains pour rien, mais avec ce sublime canapé, j'étais déjà en Enfer. Un Enfer relativement plaisant, mais tout de même. Manquait plus que Mello se pointe avec une longue cape, des dents pointues et un trident, un peu comme Karma dans ses grands moments dans Assassination Classroom, et l'immersion aurait été totale.

    Je déconne, hein, c'est bon, j'allais pas non plus me suicider ou demander le divorce pour un canapé. Et puis bon, au moins il avait le mérite d'être confortable, et il n'y avait pas que moi qu'il emmerdait. En fait, à part Mello et vaguement Matt (qui n'osait plus dire un mot contre cette horreur depuis que Mello l'avait lâchement acheté avec un jeu Batman The Animated Series sur Super Nes), il se trouve que tout le monde détestait ce truc et demandait à Mello si on ne pouvait pas le remplacer. Or, moi, j'avais pour particularité d'adorer ce qui faisait chier les gens. Le chat mal-aimé de la portée devenait mon préféré. Je trouvais « sympathique » et « innovant » film sur lequel on aimait bien taper ces derniers temps. Alors si Ross, Neylon et les autres ne pouvaient pas blairer le canapé de Mello, eh bien je m'affalais dessus à côté de Mello et déclarai d'un air supérieur qu'ils n'y connaissaient rien à la décoration, et que si les choix de Mello ne les satisfaisaient pas, ils pouvaient toujours partir.

    Ouais, si on ne regarde que ce côté-là des choses, j'adorais sincèrement cette vie dans la mafia, ainsi que Matt et Mello. Après tout, que rêver de mieux ? On avait le pouvoir, l'autorité, la quasi certitude qu'un jour où l'autre, nous serions ceux qui abattrons Kira, et en attendant, on pouvait vivre comme des hors-la-loi et faire ce que nous voulions. Notre organisation étant en excellents termes avec la police et ne laissant jamais de traces, nous ne risquions rien. Nous pouvions même demander à des mafieux de nous livrer à domicile notre bouffe pour Mello et nos moyens de distraction pour Matt et moi. La grande vie.

    Ouais enfin ça, c'était surtout la surface. Vous pouvez pas imaginer ce qu'on pouvait se faire chier, en réalité. Et non seulement nous nous ennuyions terriblement, mais en plus, nous étions forcés d'admirer Kira créer son monde sans pouvoir faire grand-chose pour l'instant. Nous étions forcés de supporter d'entendre toujours les mêmes conneries sur toutes les chaînes de télé. Depuis quelques temps, les voix des adorateurs de Kira commençaient à se faire entendre. De plus en plus de gens considéraient que Kira était bel et bien la Justice… Lorsqu'on devait se taper ça, Mello rageait et sortait parfois un flingue tout en croquant sauvagement dans une tablette de chocolat, Matt se concentrait davantage sur les trous de son Tetris et les bruits de sa Game Boy étaient plus sonores, comme s'il appuyait plus fort sur sa console dans l'espoir de la faire souffrir, et moi, je soupirais et je criais, lorsque je n'allais pas directement m'enfermer dans ma chambre.

    Franchement, plus la création du « nouveau monde » de Kira avançait, plus la simple idée de perdre me paraissait impossible. Perdre face à Kira, c'était dire adieu au monde tel que nous l'avions tous connus. C'était se soumettre à la volonté d'un dictateur, d'un tyran persuadé d'être un dieu. C'était accepter de vivre dans un monde ou non seulement les criminels, mais aussi toute personne voulant se révolter face à toute cette injustice, se ferait tuer. Rien que d'y penser me rendait malade.

    Et puis, je repensais à L… En l'honneur de sa mémoire, nous ne pouvions pas nous permettre de laisser Kira gagner cette bataille. Qu'importe les moyens à employer. Nous devions l'arrêter. Nous devions le tuer. C'était la seule issue possible pour nous.

    C'est là que j'étais contente d'avoir l'amour de Mello et l'amitié sans faille de Matt. Avec eux, j'étais persuadée que nous pouvions gagner. Qu'on serait toujours tous les trois, et que peu importe les défis, nous resterions toujours proches les uns des autres pour nous protéger mutuellement. Vous n'avez pas idée du nombre de fois où Mello, Matt et moi nous étions mis à chantonner Stand by you en chœur. Ou plus justement, le nombre de fois où j'écoutais la chanson, où Matt se mettait à chanter et entraînait Mello avec nous. L'innocence était présente. Ça me rappelait tellement l'époque des petits selfies que nous nous étions faits, à l'époque où nous étions encore à la Wammy.

    – D'ailleurs, Matt, ces putains de photos, qu'est-ce que t'en as fait ? demanda un soir Mello. Tu les as gardées ? Détruites ? Cachées ?

    – Eh bah en fait, c'est pas moi qui les aies…

    – Et qui les a, si c'est pas trop indiscret ? soupirai-je avec une pointe de sarcasme dans ma voix.

    – Avant que je vous réponde, je vous demanderai de me jurer que vous n'essayerez pas de me tuer. Surtout toi, Mello.

    – Balance, connard, soupira Mello.

    – Très bien, eh bien en fait euh… Comment dire ? …Near les a récupérées.

    – EST-CE QUE TU TE FOUS DE MA GUEULE ? MAIS PUTAIN TU DÉCONNES, MATT ! NEAR ? NEAR ! COMMENT CE PETIT ENCULÉ A PU LES AVOIR, HEIN ? BORDEL MAIS DE TOUTES LES PERSONNES DE LA TERRE, POURQUOI LUI ? ET MERDE !

    – Mello je t'en prie, calme-toi ! m'exclamai-je. On aurait pu tomber sur mille fois pire que lui. Il nous vendra jamais, au moins, j'en suis sûre. …Me regarde pas comme ça. Il se trouve que moi, contrairement à vous deux, je suis quelqu'un de sociable (je jetai un regard à Matt, qui se considérait comme très sociable lorsqu'il laissait quelqu'un le regarder jouer à Zelda) ET sympathique (mon regard se tourna vers Mello. Pas besoin d'expliquer, je pense.) Et je lui ai parlé, à Near. Je peux pas dire que je le connais bien, mais je le connais assez pour pouvoir t'assurer une chose, en tous cas : il est réglo. Il n'ira jamais donner nos photos à qui que ce soit. Et tu sais pourquoi, Mello ? Parce qu'il t'aime beaucoup. Parce qu'il te considère comme… Pas comme un ami, plutôt comme le grand frère qu'il n'a pas eu. ARRÊTE DE ME REGARDER COMME ÇA, JE TE DIS CE QU'IL M'A DIT, RIEN DE PLUS !

    – …Putain, je hais ce gosse. Un jour je le buterai.

    – Roh, allez M, tu dis ça pour cacher le fait que toi aussi, tu l'aimes bien, lança Matt avec un grand sourire.

    Ouais, j'aurais jamais osé le lui dire en face, mais c'est un peu ce que je pensais aussi. Quoi qu'il en soit, Mello décréta que nous étions tous les deux beaucoup trop cons, et alla s'enfermer dans sa chambre, poussant la radio à fond. Connaissant cette habitude par cœur, étant donné que c'était sa réaction chaque fois que Near était mentionné dans une conversation, je pris congé de Matt et suivis Mello dans sa chambre pour le calmer et lui éviter de sombrer dans une dépression ou je ne sais quoi d'autre.

    – Désolée, soufflai-je en caressant ses joues d'une pâleur marmoréenne. Je pensais pas que ça allait tourner comme ça, j'aurais du…

    – C'est rien, c'est pas toi, ni Matt… Merde, j'en ai marre de pas réussir à aller de l'avant. J'sais pas, j'ai l'impression que ça se calmera que lorsque j'aurai réussi à battre cet espèce de mouton sur jambes une bonne fois pour toutes.

    – Tu es à la tête de la mafia la plus importante des États-Unis, peut-être même du monde, l'une des rares que Kira n'a jamais réussi à complètement détruire. Pas Near. Qu'est-ce que tu veux de plus ?

    – Arrêter Kira avant lui, répondit Mello en se relevant. Être numéro 1. Ne serais-ce qu'une fois. C'est tout ce que je veux. Je veux être le premier. Je veux goûter à la victoire totale. Je veux être le gagnant, et je veux que Near soit le perdant. Après, je sais pas, je verrais. Mais tant que je n'aurai pas réussi à le battre juste une fois, je refuse de collaborer avec quelqu'un qui a toujours été au-dessus de moi. …Hey, c'est quoi ce regard ?

    – Je me rends compte que j'étais très conne de te comparer à Karma, en fait. Toi, dans Assassination Classroom, t'es le portrait craché d'Itona, à toujours vouloir être le premier. Bon, je vais pas te dire d'abandonner ton désir de toujours gagner parce que je sais que c'est pas si évident, c'est comme si je demandais à Matt d'arrêter de fumer, de se droguer ET de jouer à des jeux vidéo, mais quand-même…

    – Ed', je t'adore, mais pas quand tu me fais la leçon.

    – Ça tombe bien, je supporte pas quand j'ai ce rôle. Mais tu vois, je crois pas que toi, tu aies grand-chose à m'apprendre, rajoutai-je avec un petit sourire.

    – Ça, c'est ce que tu crois, répondit-il.

    Il se leva, ouvrit grand la porte et regarda Ross d'un air assassin.

    – Ross, veille à ce que personne ne nous dérange. Si quiconque jette ne serais-ce qu'un regard, j'envoie ce mec directement en Enfer.

    Sur ce, il me prit dans ses bras et m'embrassa tout en fermant la porte à double tours.

    Dieu, si j'avais su que ma première fois se aurait lieu ce jour-là, j'aurais un peu mieux préparé l'ambiance, et même si ma tenue n'avait rien à se reprocher, j'aurais mis un peu plus d'eyeliner. Quand j'y pense, heureusement que tout cela s'est passé de manière inopinée, parce que sinon, le côté naturel s'en serait pris un sacré coup. Puis bon, c'est pas vraiment l'ambiance, le plus important dans ce genre de situation. Quoi qu'il en soit, je vous épargnerai les détails qui ne vous regarde pas, mais pour faire vite, Mello le faisait aussi bien qu'il embrassait. Ce fut pour moi un pur moment de bonheur, et à l'en croire, il en allait de même pour lui. Je l'espérais, en tous cas. J'avais reçu, dans ma jeunesse, de nombreux excellents conseils de la part de ma mère concernant le sexe, au moins comme ça, une fois dans le lit, à quelques centimètres de Mello, je n'avais pas ressenti la moindre crainte, ni même de gêne. De toutes manières, j'avais eu pleine confiance en lui, et je peux vous assurer que j'ai eu raison. …Après, je sais pas, au début, ça me paraissait un peu bizarre de faire l'amour avec un garçon qui avait un bout de tablette de chocolat dans la bouche, mais on s'y fait vite.

    Bon, je pense que je vais éviter de m'étendre davantage sur le sujet, car je risquerai peut-être de mettre mal à l'aise les plus puritains d'entre vous, et puis je ne suis pas là pour écrire un lemon, d'ailleurs. Enfin, je suis une narratrice assez minable dans sa profession, vous l'aurez déjà remarqué. Enfin, dites-vous que si Mello s'était lui-même chargé de raconter cette histoire, il n'aurait probablement omis aucun détail, tout comme il aurait prit plaisir à raconter chacun de ses exploits en temps que chef de la mafia. Déçus, hein ?

    Bref.

    Je pense que nous pourrons sans peine avancer encore un peu dans le temps. La partie la plus intéressante de toute cette histoire, cette où Kira entrera enfin en jeu, va bientôt se produire, alors restez branchés.


  • Commentaires

    1
    Dimanche 7 Janvier 2018 à 16:55

    "j'en avais marre des personnes que je côtoyais que ce soit dans la vraie vie ou sur Internet," wa put1 sa va vaikssai korali sa!!!!!! :OO

    Putain, Josiane, lâche ce putain de clavier. Et ne me confond pas avec la Coralie 2015-début 2017, hein. Ça m'fait chier.

    //PAN//

    J'AVAIS RAISON~, EST-CE QU'IL A UNE GROSSE BITE--

    //PAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAN//

    -Putain les ados de merde en chaleur.. ' - '

    Ta gueule, conscience. Ta gueule. //pan//

    J'espère que Matt va bientôt baiser Misa--

    //PAN//

      • Dimanche 7 Janvier 2018 à 17:03

        Mais nan enfin, c'est plutôt de personnes que j'ai connues avant toi dont j'avais marre, senpai-/pan/

        Tout à fait satisfaisante, darling--//PAN//

        Ce sera pas tout de suite mais ça va arriver--//PAN//

      • Dimanche 7 Janvier 2018 à 17:08

        Bien sûr, et puis même, début 2017 n'est pas la même période que 2018~

        //pan//

        J'espère~ /pan^

        ET CHRIS, CHRIS- //OAAAN/

      • Dimanche 7 Janvier 2018 à 17:17

        C'est sûr~

        DANS LE PROCHAIN CHAPITRE, SENPAI--//PAN//

      • Dimanche 7 Janvier 2018 à 17:19

        OH OUI PUTAIN, J'ATTENDS MERCREDI * ^ *

        //PAN//

      • Dimanche 7 Janvier 2018 à 17:23

        Chris : Je suis tellement sensationnel, nul ne peut vivre sans moi--

        Ashley : *le frappe avec une poêle à frire*

      • Dimanche 7 Janvier 2018 à 17:56

        Ma8s oui, soit notre dieu Chris.

      • Dimanche 7 Janvier 2018 à 18:02

        Chris : Ah mais avec joie.

        Ashley : *soupire* Chris, tu sais ce qui est marron et très mauvais pour tes dents ?

        Chris : Aucune idée. C'est quoi ?

        Ashley : UNE BATTE DE BASE-BALL ! *le frappe avec une batte de base-ball*

        Chris : ...:D *se casse en courant*

      • Dimanche 7 Janvier 2018 à 18:06

        Helena : Hé, qu'est-ce qui estjaune et qui attend ? :D

        Shin : MON POING DANS TA GUEULE ! -_- *la frappe*

        Helena : ; _ ; Mais pourquoi tu dis queton poing est jaune ?

        Shin : Çan'a rien à voir.

      • Dimanche 7 Janvier 2018 à 18:18

        Relax, j'ai une solution. :D *se fout un gant jaune* Voilà ce qui est jaune et qui attend ! *donne un coup de poing à Helena*

      • Dimanche 7 Janvier 2018 à 18:23

        Shin : Aaah, merci Eden.

      • Dimanche 7 Janvier 2018 à 18:26

        De rien, c'est naturel~

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